Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 7.djvu/109

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regrette de n’avoir pas entendu la langue siamoise, pour savoir de ce bramine la manière dont il calculait les éclipses ; mais il conclut du moins de ses observations qu’il n’était pas du sentiment des talapoins siamois, qui enseignent que, lorsque la lune s’éclipse, un dragon la dévore et la rejette ensuite. Quand on leur objecte que les mathématiciens de l’Europe prédisent l’instant même de l’éclipse, sa grandeur, sa durée, et qu’ils savent pourquoi la lune est quelquefois éclipsée toute entière, quelquefois à demi, ils répondent froidement que le dragon a ses repas réglés, que les Européens en connaissent l’heure, et la mesure de son appétit, qui est quelquefois plus grand ou plus petit ; et c’est ainsi qu’on répond à tout.

Il restait à prendre les éléphans qu’on tenait renfermés dans l’enceinte, et le roi voulut que les mathématiciens le suivissent à cette chasse. Le jour même des observations, ils partirent à sept heures du matin. On s’enfonça dans les bois l’espace d’une lieue, jusqu’à l’enclos où les éléphans sauvages avaient été resserrés. C’était un parc carré de trois ou quatre cents pas géométriques, dont les côtés étaient fermés par de gros pieux, avec de grandes ouvertures néanmoins qu’on avait laissées de distance en distance. Il s’y trouvait quatorze éléphans de guerre pour empêcher les sauvages de franchir les palissades. Les six jésuites étaient placés derrière cette haie et fort