Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 7.djvu/152

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mis en pièces presque avant que nous nous fussions aperçus de l’attaque ; ensuite, sans reprendre haleine, ils poussèrent vers les troupes que je commandais. Quoique j’eusse plus de mille soldats armés de lances et de fusils, la frayeur dont ils furent saisis les mit en déroute. Les Macassars leur passèrent sur le ventre, tuant à droite et à gauche tous ceux qu’ils pouvaient joindre. Ils nous eurent bientôt poussés jusqu’au pied de la muraille du nouveau fort. Six d’entre eux, plus acharnés que les autres, poursuivirent les fuyards, et firent partout un carnage horrible, sans distinction d’âge ni de sexe.

» Dans cet embarras, ne pouvant plus retenir le gros des troupes, je les laissai fuir, et je gagnai le bord du fossé, résolu de sauter dedans, si j’étais poursuivi. Ce fossé étant plein de vase, je comptais qu’ils ne pourraient pas venir à moi avec leur vitesse ordinaire, et que j’en aurais meilleur marché ; ils passèrent à six pas de moi sans m’apercevoir, trop occupés à égorger mes malheureux Siamois, dont pas un ne songea seulement à faire face pour se défendre, tant ils étaient saisis. Enfin, ne voyant aucun moyen pour les rallier, je gagnai la porte du nouveau fort, qui n’était fermée que d’une barrière, et je montai sur un bastion d’où je fis tirer quelques coups de fusil sur les ennemis qui, se trouvant maîtres du champ de bataille, et n’ayant plus personne à tuer, se retirèrent sur le bord de la rivière.