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nent trop riches, de peur que l’ambition et l’orgueil ne leur fassent perdre le goût de la soumission : et les souverains ferment l’œil, par cette raison, sur les injustices de leurs officiers.

En un mot, le commerce est si peu florissant dans le royaume du Tonquin, que si les habitans achètent quelque chose des étrangers, c’est toujours en leur demandant trois ou quatre mois de crédit ; et par conséquent avec quelque risque pour l’étranger de perdre sa marchandise, ou d’avoir beaucoup de peine à se faire payer. Baron reconnaît, au désavantage de sa nation, qu’il n’y a point un seul marchand tonquinois qui ait le pouvoir ou le courage d’employer tout d’un coup deux mille écus en marchandises. Cependant il ajoute qu’on ne saurait leur reprocher d’être aussi trompeurs que les Chinois ; ce qui vient peut-être, dit-il avec la même sincérité, de ce qu’ils ont moins d’esprit et de finesse.

Une autre raison qui s’oppose au commerce du Tonquin, c’est que la plus grande partie de l’argent qui entre dans le pays passe à la Chine pour y être échangé contre de la monnaie de cuivre, qui monte et qui baisse au gré de la cour. D’ailleurs la marque de cette monnaie s’altérant bientôt, elle cesse alors d’être courante ; ce qui cause une perte considérable aux marchands, et d’autant plus de préjudice au bien public, que le pays n’a pas de monnaie de cuivre au coin du prince dans laquelle on puisse convertir l’autre à mesure qu’elle s’altère. Ba-