Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 8.djvu/63

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» Il va trois sortes de nations dans l’empire, nous fit-il dire encore. Les Mantchous vous aiment et vous estiment ; mais les Chinois et les Mogols ne peuvent vous souffrir. » Enfin il nous fit dire de ne rien traduire de nos sciences dans le tribunal où nous étions, mais seulement dans l’intérieur de notre collége ; que cet avis qu’il nous faisait donner n’était qu’une précaution, et que nous ne devions pas craindre d’y avoir donné occasion par quelque faute ou quelque imprudence, puisqu’il était fort satisfait de nous.

» Ensuite il nous envoya ordre de rediger par écrit quelque partie de notre doctrine philosophique. On nous insinua que nous devions achever ce que nous avions commencé, mais qu’il fallait que notre travail se fit dans l’intérieur de notre maison, et sans le communiquer à personne.

» Le 8 mars, nous nous rendîmes dans l’appartement d’Yang-tsin-tien, les pères Bouvet, Pereyra, Thomas et moi. Sa majesté y vint dès le matin, et s’y arrêta deux heures avec nous. Elle lut ce que nous avions écrit en lettres tartares ; ensuite s’étant fait expliquer la première proposition du premier livre d’Euclide, elle l’écrivit de sa propre main, après en avoir bien compris l’explication : elle marqua beaucoup de satisfaction de notre travail. Le même jour elle nous fit donner à chacun deux pièces de satin noir et vingt-cinq taëls, non pour récompenser, nous dit-elle, la peine que