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fut un spectacle nouveau pour la cour et la ville : les grands et le peuple ne se lassaient pas de courir pour entendre cette musique.

La poésie et l’éloquence sont des arts fort anciens à la Chine : sans parler de leurs anciens livres, dont une partie est en vers, on admire la délicatesse et la douceur extrême des poëmes de Kiu-i-uen. La dynastie des Tang vit fleurir Li-tsao-pé et Tou-té-moeï, deux poëtes que l’on met à côté d’Anacréon et d’Horace ; ce qui ne prouve pas que nous devions le croire. Les poëtes, à la Chine, sont tous philosophes, et, de tous les écrivains chinois qui ont quelque réputation, Tseng-nan-fong est le seul qui n’ait point écrit en vers. C’est ce qui le fait comparer à la fleur haï-tang, qui serait parfaite, si elle n’était pas insipide.

Pour bien comprendre en quoi consiste la beauté de la poésie chinoise, il faut être versé dans la langue du pays : les compositions poétiques des Chinois ont quelque ressemblance avec les sonnets, les rondeaux, les madrigaux et les chansons de l’Europe : ils ont de longs vers, ils en ont de courts, c’est-à-dire qu’il y entre plus ou moins de mots, et que leur beauté consiste dans la variété de leur cadence et de leur harmonie. Les vers chinois doivent avoir ensemble une relation de sens et rime qui forme une variété aussi agréable à l’esprit qu’à l’oreille. On distingue à la Chine une autre sorte de poésie sans rime, qui consiste dans l’antithèse, ou l’opposition des pensées : si la