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Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/110

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—1o2— Nous, les écrivains et les artistes, nous protestons. Et nous ne faisons point de politique, nous dénonçons une basse manœuvre politique, une manœuvre louche et torve, qui veut, grâce à la plus étonnante collusion, transformer une nomination d'où dépendent exclusivement des intérêts d'art en une opération politique. Voilà ce que nous avons fait et ce que nous faisons encore. M. Tardieu, polémiste libéral, est le candidat de M. Woeste, catholique pointu. Or, M. Woeste est absolument étranger à l'art et à la littérature. C'est un exclusif politicien. Dès lors, la candidature de M. Tardieu, préco nisée par M. Woeste, n'est plus qu'une candidature politique. Et nous avons le droit de l'examiner et de la dénoncer à l'indignation des artistes. Des faits sont là qui prouvent l'alliance politique de ces messieurs. M. Tardieu a lancé dans son journal quotidien une idée qui n'avait d'autre but que d'ennuyer le gouvernement pour faire plaisir à M. Woeste. C'est lui qui a proposé de rattacher à l'art. 69 de la Constitution la disposition relative au reférendum royal; quelques jours plus tard, on voyait avec surprise la section de la Chambre présidée par M. Woeste voter la propo sition « inventée » ou lancée par M. Tardieu. C'est un allié de M. Woeste que l'on projette de caser à la direction des beaux-arts pour assister le ministre et, au besoin, pour le combattre. Et dans quel but catholiques tricornards et libéraux melliflus conspirent- ils pour placer à la direction des beaux-arts un homme qui ait leur con fiance mixte? C'est qu'ils sont d'accort pour combattre YArt. L'art, l'art vivant, l'art qui agit et qui produit, l'art d'aujourd'hui et de demain fait peur à ces vieilles chouettes. L'art, pour ne point gêner leurs petits calculs, doit n'être qu'une inoffensive conserve. Tout ce qui fait penser, tout ce qui émeut en faveur d'autre chose que les vieilles formules politiques, est dangereux et doit être étouffé. Voilà le secret de la coalition que nous avons révélée ! Lisez maintenant et jugez l'incroyable article de la Revue flamande de littérature et d'art : M. Charles Tardieu vient, dit la presse quotidienne, de poser sa candidature. Nous en sommes étonnes et ravis. Etonnés, parce qu'il veut quitter une situation de journaliste de premier ordre, dans laquelle il ne peut que faire honneur à notre pays ; ravis, parce que si sa nomination se réalise, toutes les opinions d'art seront sauvegardées. Et, en effet, MEMBRE* CORRESPONDANT DE NOTRE ACADÉMIE, il possède l'estime de ce corps savant, dont on ne peut pas méconnaître les préférences. Comme directeur de l'Indépendance belge, à laquelle il a donné une largeur de vue