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littéraire qu'aucun organe français de cette importance ne possède, il s'est toujours montré bienveillant, favorable, serviable à toutes les manifestations d'art, quel que fût leur caractère.

Rien ne l'obligeait, cet homme, de donner aux œuvres des auteurs belges une publicité et une sanction qu'aucun autre organe de presse, en Belgique, n'eût pu leur donner. Et il n'est pas un de nos écrivains nationaux qui n'ait joui de cette large, féconde et généreuse publicité.

Assez de flagorneries, n'est-ce pas? Nous allons voir de quoi la Revue flamande, etc., est « étonnée et ravie ».

Voici un échantillon de la « publicité » et de la « sanction » données par l'Indépendance belge à l'un des plus remarquables poètes de notre pays, M. Emile Verhaeren :


Jeudi soir, conférence de M. Emile Verhaeren, poète, avocat, professeur au cours supérieur pour dames, critique littéraire et artistique; sujet : les Esthétiques littéraires modernes, la Critique ; public très clairsemé, où quelques frères et amis et quelques bons prudhommes, ambitieux de paraître des passagers du dernier bateau, ont applaudi spécialement les violences traditionnelles, les naïves et lourdes invectives aux critiques.
Il est tout à fait plaisant que M. Verhaeren. qui appartient à un groupe de chourineurs de l'écritoire, jouant hebdomadairement au jeu du massacre, vienne dénoncer sans rire les prétendus outrages de critiques, ayant toujours dédaigné les gros mots, comme trop faciles
Ceux qui lisent certaines publications hebdomadaires ou mensuelles savent quelles plumes, exaspérées de n'être pas assez louées, crachent abondamment l'injure personnelle. Il est vrai que ces lecteurs sont rares, et que les associés de l'invective pour la notoriété en sont réduits à se lire entre eux. Mais cela n'empêche pas que les « paquets de linge sale », dont M. Verhaeren a parlé délicatement — c'était le mot spirituel de sa conférence — soient exclusivement déballés dans les sous-sols littéraires, où travaillent quelques jeunes auteurs
Ne blâmons pas cependant cette péroraison surprenante de la conférence de M. Verhaeren. Il aurait été ennuyeux, malgré d'ingénieuses explications littéraires, sans ce morceau final, qui est arrivé à être amusant, sans un trait fin, et même sans un mot pittoresque.

Telles sont la « sanction » et la « publicité » de l'Indépendance belge, qui, presque le même jour, se pâmait d'aise à la conférence de Coquelin.

Mais M. Coquelin est Français. On sait que l'Indépendance a reçu d'en haut la mission d'octroyer sa « sanction » et sa « publicité » à tout oiseau qui vient de France, cet oiseau fût-il le plus vilain canard, — car on y néglige un peu les aigles et même les rossignols.

Et s'il faut un nouvel exemple de l'amabilité de M. Tardieu envers la jeunesse artistique et littéraire, on le trouvera plus loin. Nous publions, en


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