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Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/114

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—io6— Là-bas, vers les grands bois obscurs et pavoises Avec des grappes d'ombre et des /leurs de lumière, Où les rameaux noueux se tordent enlacés Dans un spasme muet de sève et de matière. Et telle, une suprême et magnifique fois Mon rêve aura voulu ta beauté rouge et forte; Pauvre corps ! pauvre chair ! pauvre et douce voix Morte ! III La mort peindra ta chair de ce beau ton verdâtre Délicatement jaune et si fin, qu'on dirait Qu'à travers le cadavre un printemps transparaît Et qu'une lueur jeune en avive l'albâtre. Et recueilli du cœur, des yeux et du cerveau, Sentant pâlir en moi, comme un feu de lumière, Le souvenir trop net de ta beauté plénière, Tirai m agenouiller devant ce corps nouveau. Je lui dirai les grands versets mélancoliques Que l'église, ta mère, épand aux trépassés, Et je lui parlerai de nos amours passés Avec les mots fanés des lèvres catholiques. Je fixerai dans mon esprit ses traits humains, Ses yeux scellés au jour, au soleil, à la gloire. Et rien n'effacera jamais de ma mémoire La croix que sur ton cœur auront formé tes mains. Et pour réaliser ton suprême souhait. Le soir, dans la piété des chrétiennes ténèbres, Je sortirai ton sein de ses voiles funèbres Et je le baiserai tel que la mort l'a fait.