Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/15

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Son unique charte, c'est la formule : « l'Art pour l'Art ». C'est assez dire qu'elle n'entend pas plus aujourd'hui qu'autrefois admettre n'importe quelle théorie d'art social, politique, philosophique ou confessionnel. Il va de soi que chacun de nos collaborateurs garde le droit de professer en son nom personnel telle opinion qu'il lui plaira. Une question de politique générale appellera cependant bientôt notre attention. On parle, dans le monde officiel, de réorganiser le Sénat du royaume sur la base de la représentation des intérêts et l'on y accorde une place aux intérêts artistiques et littéraires. En cette matière la Jeune Bel gique a son mot à dire et elle le dira. Peut-être les circonstances nous amène ront-elles à passer du terrain de la théorie sur le terrain de l'action. Nous aurons alors à mettre à exécution un projet dont il a déjà été parlé au ban quet du io janvier 1891. L'année 1892 s'annonce, en effet, comme devant être pour nous d'une importance exceptionnelle. Nous comptons sur le dévouement de nos amis et de nos alliés. Parmi ceux-ci, nous saluons au premier rang l'Art moderne et la Société nouvelle, plus vaillants et plus prospères que jamais : de notre côté, nous appuierons de toutes nos forces les efforts qu'ils feront pour le développement intellectuel, artistique et littéraire du pays. L'éditeur Deman continuera cette année ses belles publications de luxe. L'éditeur Lacomblez a rendu aux lettres belges un service signalé en concentrant dans sa maison la publication des ouvrages de la plupart de nos amis. Jusque-là nos efforts étaient éparpillés ; grâce à lui ils sont réunis en un faisceau puissant, qui a forcé l'attention publique à se fixer davantage sur nos travaux. Nous souhaitons que son entreprise prospère et se développe. Nous espérons que les pouvoirs publics subsidieront un jour une librairie belge à Paris, afin de favoriser l'expansion à l'étranger de nos lettres nationales et de la renommée artistique de notre patrie. En terminant, nous rappellerons brièvement notre programme. Indépendamment de nos productions personnelles, nous voulons tra vailler au développement de l'éducation esthétique, car nous sommes per suadés que le goût artistique est la fleur suprême d'une véritable civilisation; à cet effet, nous essayerons d'obtenir la création d'un cours d'esthétique générale dans les facultés de philosophie. Tandis que nos productions littéraires doivent aller trouver l'étranger chez lui, nos musées et nos théâtres doivent se donner pour mission d'attirer l'étranger chez nous. Nos collections de gothiques flamands sont uniques au monde : il faut tâcher de les développer. Les musées de peinture moderne sont presque