Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/154

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—146— — Le fleuve éthéré coule plein, — La poitrine débarrassée de la chaleur — Respire plus librement et plus légèrement. — Un doux frisson, comme une onde, — A parcouru les fibres de la nature, — Comme si ses pieds échauffés — Étaient effleurés par les eaux des fontaines. XIV ' Le crépuscule Les ombres bleues se déplacèrent, — La couleur pâlit, le son mourut, — La vie, le mouvement se résolurent — En une obscurité vague, en un écho lointain... — Du papillon le vol invisible — Se perçoit dans l'air nocturne... — C'est l'heure d'une mélancolie inexprimable! — Tout est en moi, et moi en tout!... — O crépuscule calme, ô crépuscule rêveur, — Doux, attendri, aromatique, — Coule, ô coule dans la profondeur de mon âme, — Pour y noyer tout et me tranquilliser ! — Les sentiments, du brouillard de l'oubli -—- Remplis-les jusqu'au bord... — Ah! laisse-moi savourer le charme de l'anéantissement — Et mêle-moi au monde endormi ! XV Mon âme voudrait être une étoile, — Mais non quand du haut du ciel de minuit — Ces lumières, comme des yeux vivants, — Contemplent le monde terrestre qui sommeille. Mais durant le jour quand, voilées par la buée — Des rayons incan descents du soleil, — Elles brûlent plus claires, comme des divinités, — Dans l'éther pur et invisible. XVI Vision Il est une heure de silence universel; — En cette heure d'apparitions et de miracles, — Le char vivant de l'univers — Roule ouvertement dans le sanctuaire des cieux ! Alors la nuit s'épaissit comme le chaos au-dessus des flots ; — La défail lance oppresse le continent comme l'Atlas... — Et seule l'âme virginale de la Muse — Est troublée par des songes prophétiques que lui envoyent les dieux. XVII Ce jour, j'en ai souvenance, était pour moi — La matinée d'un jour plein de vie : — Elle se tenait debout devant moi, — Sa poitrine se sou