Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/183

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

-i75- me gâterais ma laine — Et ne saurais endormir mon petit enfant. » — La mère partit — partit comme égarée... — Elle rencontra sa propre fille : — « Que fais-tu là, ma mère, pourquoi erres-tu ainsi? — N'aurais-tu pas d'asile?» — « Aussi longtemps, ma fille, que j'élevais mes enfants, — Aussi longtemps aussi j'avais un foyer, — Et maintenant que j'ai marié mes enfants — Je n'ai même plus d'asile. » — « Viens, ma mère, viens donc chez moi; — Seulement, mère, j'ai une vie bien dure; — Aussi, quand mon mauvais sort voudra me battre, — Ne te jette pas, mère, entre nous pour me défendre ! » — Quelque temps après, un temps pas bien long, — Voici que le fils va prier sa mère : — « Reviens maintenant, mère, chez moi, — Car je suis dans une mauvaise passe; — Mon sort est maintenant changé ; — Ma femme est morte, le petit enfant reste seul. » — «Même ta chaumière brûlerait, mon frère, — Que j'empêcherais encore la mère de l'aller éteindre. » VIII Le rouge obier — Se penche sur l'eau du marais, — La jeune femme s'attristait — D'être née avec une mauvaise chance, — De s'être mariée sans bonheur. — « Ah ! j'irai toujours en clamant — Pour chercher mon bonheur; — J'irai jusqu'au Danube — Et là je clamerai de toutes mes forces. — Mon sort me répondit —. De ce côté de la mer bleue : — Ne te tourmente pas, mon amour, — Car me voici, ton sort; — Ne te tour mente pas, ma chère belle, — Car me voici, ton sort infortuné... — Flotte, flotte le long du courant — Et je serai derrière toi ; — iNous aborderons ensemble le rivage, — Nous nous asseyerons sur le sable — Et nous écri rons chacun une lettre — A la famille, aux amis. » IX Oh ! je creuserai une fontaine chez moi, dans la cour, — Oh ! je con querrai l'amour d'une jeune fille. — Déjà à cette fontaine les aigles viennent boire, — Déjà ma bien-aimée on la conduit à l'autel ; — Le premier la conduit par la main, le deuxième par la manche, — Le troisième reste à l'écart souffrant du cœur : — il l'aime et ne la prit point. — Je ne regrette pas les cadeaux que je lui ai donnés, — Mais je regrette les superbes petites lèvres que je baisais; — Je ne regrette pas les bagues que j'ai achetées pour elle, — Mais je regrette ces blanches petites mains que je serrais si tendre ment ; — Je ne regrette pas le mouchoir que je lui ai rendu, — Mais je regrette la chère petite dont je suis si épris.