Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/213

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—2o5— « Jésus! Nouveau Jésus ! O toi vers qui nous mène Le doigt mystérieux d'un astre ensanglanté! Jésus! Suprême espoir de la folie humaine, Nous adorons ta grâce et ta divinité. Ton royaume est trop beau pour être de ce monde! Crains ceux par qui ton nom serait glorifié, Car ils tendraient la main, dans une étreinte immonde, A ceux par qui le Christ mourut crucifié! En vain tu sèmerais, miraculeux trouvère, Le ciel bleu de tes chants dans les cœurs ténébreux ; Entre les deux larrons, sur l'arbre du Calvaire, En vain tu mûrirais comme un fruit douloureux, Les enfants les plus chers de ton Verbe adorable, Pour mieux le travestir et pour mieux finsulter. Changeant ta Croix sublime en glaive misérable, Dans la chair de l'Agneau s'en iraient le planter ! Ce n'est pas les pieds nus, montés sur une ânesse, Par des chemins jonchés de fleurs et de rameaux, Que sans armes, et forts de la toute faiblesse, Ils prêcheraient ta gloire aux barbares nouveaux, Mais en fils de Caiphe et de Ponce-Pilate, Escortés de soudards et d'infâmes bouchers, Et traînant dans les plis de leur robe écarlate Avec l'âme des morts le reflet des bûchers! Les ailes du Démon empanachent leur tête Et de l'empanacher s'allongent d'un empan ! Leur tiare a des dents et mord comme la Bête! Leur crosse est un aspect de l'antique Serpent! Regarde-les, Dieu pâle et couronné d'épines! Le meurtre éclôt du sol foulé par leurs manteaux Et leur ville d'orgueil, la Ville aux sept collines, Offre un temple à chacun des péchés capitaux,