Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/29

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Certes, tu n'auras pas désespéré : Serrant ta volonté autour de toi (Comme on serre un manteau trempé de pluies) Tu marches droit, Tu te sais immortel et tu défies Le temps que tu sais leurre ; Mais tu as peur de mourir, même une heure — Une heure!... tu le vois bien, l'heure t'étreint, Mon frère humain. Tu es triste; Tout souvenir est un tombeau sans Christ; La route qui t'a mené jusqu'ici D'un vieux souci vers un jeune souci (Si tu te retournais, la main au front, Ainsi que celui qui regarde au loin, Ainsi que font Aux portes des tombeaux les hauts veilleurs de marbre) La route est toute de croix bordée, Et d'arbre en arbre... Ton bel amour, ta jeune idée! Si bien que tout rire d'un sanglot se fausse Et que ton cher espoir se fait atroce. O crois moi, qui me souviens de demain . La haute joie est douloureuse et telle Qu'en sa douleur l'âme exulte immortelle, Pleurer est doux par-dessus toutes choses; Assieds-toi, près de moi; Quand j'ai pleuré, la tête entre les mains, J'ai vu, entre mes doigts, ce lent jour gris tout rose; Alors, mon âme eut foi. Et toi, ma sœur qui passes, Je te sais triste, aussi, bien que tu fasses, Bien que tu pares de gattés l'inquiétude, Bien que tu traînes aux cailloux, fleurdelysés, Les pans altiers de ta robe de prude,