Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/311

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-3o3— Elle dessille ses grands yeux encore pleins Des mirages gemmés qui s'y reflétèrent Pendant son sommeil volontaire. Elle écarte la petite main Fleurissant de jacinthes ses seins. Et la petite main sous sa tête posée Puis elle dit, libérant ses pensées : « O toi qui me croyais exilée, j'ai vu! Je sais ce que disait tantôt la Terre En son idiome inconnu... Je sais quelles senteurs légères Montaient des longs guérets éblouis de moissons -, Et ces villages, que nous laissons Dans leur saine sieste immobiles, Ils vivent pour toujours en ma mémoire subtile. « Mais le pays auquel aspire mon désir Surgira plus beau tout à l'heure Que ces là-bas qui fleurent Vers les nuages blancs qu'un %éphir peut sancir. Mon pays surpasse toute nature Et toute aventure. « Ceux qui marchent sans le savoir Dans des ténèbres mortuaires Renaîtront éjoyés à seulement me voir, Car mes mots glisseront tels de vives torchères Le long des murs sans fin De leur esprit éteint. » Or, voici que soudain oblique le fleuve Du côté où déjà s'entend, Porté par une brise neuve, Le chant vaste du large où va le fleuve lent. Le site soudain vers le nord diffère Et, contemplative, aux moissons prospères Succède la bruyère.