Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/319

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-3u- faire amende honorable en toute franchise et rendre hommage à un art et à un artiste devant lesquels, aujourd'hui, il nous est impossible de nous incliner. IWAN GlLKlN CHRONIQUE LITTÉRAIRE Les Vergers illusoires, par André Fontainas. Librairie de l'Art indépendant. Paris. — Sérénité, par Léon Donnay. Godenne, Malines. — Evocations, par Eugène Landoy. Lacomblez, Bruxelles. — L'Adolescent confidentiel, par Michel Féline. Librairie de l'Art indépendant, Paris. — Les Poésies d'André Walter. Librairie de l'Art indépendant, Paris. — Le Fou raisonnable, par Arnold Goffin. Vos, Bruxelles. — France et Belgique, par Victor Hugo. Calmann-Lévy, Paris. — L'Invisible, par J. de Tallenay. Lacomblez, Bruxelles. — Les Contes d'Amérique, par Louis Mulleh. Collection des chefs-d'œuvre, Paris. — La Passante, par Adrien Remacle. Collection de la Plume. Paris. Le livre de M. André Fontainas, Les Vergers illusoires, ne peut man quer d'intéresser, voire de surprendre, les lecteurs qui se rappellent le Sang des fleurs. Dans sa première œuvre, — que je le soupçonne fort de renier — M. André Fontainas m'apparaissait comme un artiste d'exception. « Il nous fait penser, écrivais-je alors, à quelque poète de la Pléiade, conçu par Pierre de Ronsard ou Joachim du Bellay, et qui serait né, par ricochet, vers la fin du XIXe siècle. Et de même, ajoutais-je, qu'un poète baudelairien couvé par un décaméron d'artistes du XVIe siècle eût été, à leurs yeux, un phénomène, de même M. André Fontainas s'offre aux artistes de notre temps et de notre race comme un anachronisme vivant. » M. André Fon tainas était alors, en effet, le poète de la jeunesse, de la beauté et de l'amour. Il rimait l'Ode à la joie, cette ode que M. Charles Morice deman dait récemment aux nouveaux chanteurs français. Aussi pouvait-on le considérer, dans son isolement littéraire, comme un des précurseurs d'une réaction contre le pessimisme victorieux, et d'un retour à une poésie clas sique. En d'autres termes, on pouvait attendre de lui ce que l'on attend vainement aujourd'hui des archéologues constipés de l'école romane. Si quelqu'un en doute, qu'il lise les odelettes du Sang desfleurs. Après un assez long silence, M. André Fontainas nous revient avec une œuvre hétérogène, qui porte la trace d'un grand nombre d'influences nou velles. Non qu'il ait tué sa personnalité de naguère. Il lui en reste un lambeau, et c'est tant mieux. Mais ce lambeau ne s'assortit guère avec certaines draperies d'invention récente, et il témoigne d'une curieuse bataille intérieure. M. André Fontainas, naguère poète plastique, attiré surtout par le spectacle de l'univers physique et par les apparences luxueuses des choses, est aujourd'hui entamé par le pessimisme ambiant. Sa belle voix sonore est voilée par je ne sais quel brouillard, émané de la philosophie en honneur