Page:La Jeune Belgique, t11, 1892.djvu/60

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—52— Si ton sang a rougi les chemins de l'erreur, Ah! qu'importe? Un Léthé d'ineffable langueur Baigne les vallons bleus où t'ont pleuré les Muses. Que tardais-tu, dis-nous, parmi le peuple vain? La lyre t'a bercé, dans un calme divin. Là-bas gronde à jamais la vie, aux voix confuses! Mais toi, chanteur paisible, à l'ombre de tes bois, Silencieux pour tous, pour toi peuplé de voix, En quel bienheureux songe, enfant, tu te recueilles! Reviens-nous! Et, fidèle au rêve familier. Ravis le bois céleste où grandit ton laurier, D'un chant simple et nouveau comme le bruit des feuilles. » Fernand Severin MAISON PATERNELLE wm ieille maison, vieille maison où je suis né, que je vous aime. Vous êtes vieille, ô chère maison et bâtie simplement ; vos briques et le mortier qui les rejoint ont été battus par les vents et les bourrasques, usés par les pluies, noircis par les fumées du pays industriel. Et pourtant comme vous êtes heureuse encore, les premiers jours de printemps avec vos grandes fenêtres au large ouvertes comme pour respirer des forces et de la vie, — tandis qu'un clair soleil luit au travers des nuages gris, que votre toit d'ardoise fraîchement lavé de pluie, reflète les nuages qui passent par-dessus lui, et de clairs gouffres d'azur formés par les nuages qui s'écartent. — Les brises pénètrent dans la maison par les fenêtres larges ouvertes, les murs des corridors peints à la colle suintent et laissent échapper l'humidité des longs mois d'hiver, les escaliers craquent, des voix joyeuses retentissent, la maison tout entière revit, — tandis qu'au jardin qui l'entoure de pâles bourgeons verts s'entr'ouvrent aux tiges des lilas noirs, et que bordant les chemins les douces violettes embaumées s'épanouissent en la terre rajeunie.