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Page:La Justice du Var, année 6, n° 452 (extrait), 10 août 1890.djvu/17

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et le tapissier ont été peu à peu réglés par à-comptes. Je n’ai pas encore fini de les payer. Où sont les millions ?

Voici à quels aveux on réduit les serviteurs désintéressés de la République.

Que la honte de cette humiliation soit sur ceux qui ont rendu cette confession nécessaire.

C’est ainsi qu’on décourage les bons, les fidèles serviteurs pour faire place aux pires.

Toutes les têtes de meute ont donné dans cette clameur furibonde. Au premier rang, à pleins poumons, la presse bien pensante, la presse dite libérale, tirant argument des rancunes boulangistes, la presse payée ; les journalistes officiellement gorgés de l’argent du Panama, décernant, moyennant finances, l’auréole du martyre à des hommes condamnés pour escroquerie ; des journaux fondés ou subventionnés par des entrepreneurs du Panama, ayant réalisé les scandaleux bénéfices que j’ai dit ; et puis, les hommes d’affaires et de toutes les affaires dans le Parlement et hors du Parlement. Ce fût un dévergondage de vertu, aggravé d’un bouillonnement de haines. Cependant les hommes de paix, silencieux, tournaient discrètement la tête pour ne point voir, tirant à eux, par mégarde, autant de couverture qu’il se pouvait.

Pour que ce fût complet, un républicain se leva, dénonçant l’attaque comme dirigée contre la République, et pour la déjouer proposant d’appuyer la meute. Pour réduire les aboyeurs au silence, il suffisait aux républicains d’aboyer plus fort.

Ce fut un grand succès.

Quelques jours après, de jeunes essoufflés reprochaient à M. Ribot de subir une influence occulte : la mienne. Quelle ironie.

Cependant, la clameur continuait de plus belle. Les uns ardents à mettre sur un seul toutes les déceptions, toutes les erreurs, toutes les fautes, toutes les responsabilités du passé ; les autres, les fameux convertisseurs de monarchistes à la foi républicaine déchaînés contre qui n’épargnerait aucun effort pour barrer la route à l’aventure.

Des modérés, aigris d’impuissance, exaspérés de rancunes, avec les boulangistes, acharnés contre l’ennemi d’hier ;

Les ralliés, contre l’ennemi de demain ; la droite, contre l’ennemi de toujours. Tous ameutés.

Rends-moi mon portefeuille, clamait l’un.

Tu ne nous l’ôteras plus, disait l’autre.

Ton règne est fini, criait le colonial qui coûte le plus cher à la France.

Parle-nous de la Haute Cour.

Qu’as-tu fait de Boulanger ?

Qu’allais-tu faire à Carmaux ?

Nous le dénonçons, c’est lui qui a fait l’insuccès de notre politique.

Il a combattu l’expansion coloniale, c’est un ennemi de la France.

Il introduisait des espions au ministère de la guerre.

Il renversait des ministères sur l’ordre de l’étranger.

Qu’il parle anglais.