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Page:La Justice du Var, année 6, n° 452 (extrait), 10 août 1890.djvu/19

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auraient dû, dans les papiers faux, ne pas mettre d’autres noms que le mien. Ainsi se consolent les grandes âmes dans l’observation des choses et l’analyse des phénomènes. (Rires.)

Messieurs, je ne ferai entendre ni récrimination ni plainte. De loin vous avez vu les grandes péripéties. J’ai vu de trop près les petites. J’ai tout subi sans qu’un cri m’échappât.

Mais, c’est assez parlé de moi.

On a voulu par tous les moyens possibles supprimer les défenseurs de la vieille politique républicaine ; ils sont encore debout.

Et si vous le voulez bien, ignorants des personnes, oublieux des intentions, nous allons demander des comptes à la politique nouvelle, au profit de laquelle on a tenté cette ignoble aventure.

C’est un signe des temps que tout le monde parle d’une politique nouvelle. De tous les côtés on est las de l’équivoque et des atermoiements. La machine parlementaire fonctionne à vide. Des intentions droites, des bonnes volontés actives, un labeur considérable aboutissent à des résultats insuffisants, quelquefois dérisoires. Dire que la République n’a rien fait est un mensonge. Dire qu’elle n’a pas fait tout ce qu’elle aurait pu, tout ce qu’elle aurait dû, est devenu une banalité. On veut en finir avec un système de gouvernement usé. Tout le monde a besoin de clarté, d’action utile et féconde.

Le pays tout entier veut garder la République. La question est de savoir si l’on en fera un instrument de conservation des vieilles lois monarchiques ou de réformation politique et sociale. Que ses deux tendances de l’esprit humain : le désir de conserver et le besoin de changer, se partagent le parti républicain ; que les républicains se divisent et s’organisent suivant ces affinités, rien de plus naturel. Je l’ai déclaré à Bordeaux en 1885, la République n’aura pris définitivement possession de ce pays, elle ne sera organisée pour la vie et le progrès auxquels ses destinées l’appellent, que lorsqu’elle pourra répondre aux deux sentiments dont la manifestation successive est toute l’histoire de l’humanité.

Mais pour que cette transformation se fasse à l’avantage du pays, il faut qu’elle soit sincère, c’est-à-dire le jeu naturel, la mise en action spontanée des forces républicaines.

Or, nous pouvons le dire bien haut, cela n’a rien à voir avec l’entreprise purement monarchique, qui s’appelle aujourd’hui la politique des ralliés.

Je ne parle pas des intentions de tel ou tel de ceux qui mènent la campagne, parce que les intentions ne comptent pas et qu’en politique les chefs sont poussés plus souvent qu’ils n’entraînent.

Je prends les faits, et les faits parlent assez haut. Les faits, c’est dans les temps récents : le boulangisme subventionné par les monarchistes, machine de guerre contre la République. Les faits, c’est la campagne du Panama, machine de guerre contre la République. Et voilà que, du jour au lendemain, sans d’autre motif que sa défaite, l’armée assiégeante demande à défendre la citadelle qu’elle n’a pu emporter d’assaut. La ruse est d’un enfant et ne peut tromper personne. (Très bien ! Très bien !)