Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/151

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À ces mots, Béniowski montra le cadre où reposait la comtesse pâle et accablée par la souffrance.

Flèche-Perçante prit Wenceslas dans ses bras, et, le présentant à la multitude :

— Reconnaissez le vrai sang de Ramini ! dit-elle.

Son geste, sa voix, son action émurent favorablement une partie des insulaires.

Alors un vieillard à barbe blanche, dont le teint était d’un brun rougeâtre et les traits de la plus grande pureté, s’approcha de Béniowski en réclamant la parole :

— Je ne suis point de la Grande-Terre, dit-il, j’ai vu la lumière du jour à Nossi-Hibrahim (Sainte-Marie) ; Ramini pour nous n’est point un prophète ; nous sommes fils d’Abraham, et notre jour saint est le Sabbat. Chef des Français, quel que soit ton nom ou ta race, j’offre à ta femme malade et à ton enfant l’hospitalité dans ma demeure : c’est une case petite ; car Eliézer n’est qu’un simple pêcheur ; mais pourtant il a le droit de tuer son bétail lui-même, il rend la justice à tous les Zaffi-Hibrahim établis au bas de cette rivière, et il siège parmi les philoubés d’Antimaroa. Ma case est petite, mais elle sera toujours ouverte à ceux qui souffrent et qui n’ont point d’asile.

Béniowski, touché de la proposition d’Eliézer, exprima sa reconnaissance avec l’emphase nécessaire pour produire impression sur les Malgaches.

— Que le souverain créateur des mondes, dit-il, te protége, ô vieillard, toi, tes enfants et les enfants de tes enfants jusqu’à la postérité la plus reculée ! Que tes paroles de paix montent vers Dieu comme le sacrifice d’Abel. Que l’hospitalité que tu offres à la voyageuse mourante et à son faible fils te soit rendue dans le sein d’Abraham, lorsque, rassasié de jours, tu monteras vers le ciel.

Béniowski s’était toujours proposé de contracter une étroite