Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/152

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alliance avec les Zaffi-Hibrahim. La démarche d’Eliézer accrut nécessairement ce désir ; mais il se garda de prononcer une seule parole de nature à indisposer les Zaffi-Rabès, nation belliqueuse dont les croyances étaient les mêmes que celles de l’immense majorité des habitants de Madagascar.

Engagé, un peu malgré lui, par le chevalier du Capricorne, dans le personnage de Râ-amini, Béniowski ne pouvait plus renoncer à un rôle qui présentait de sérieux avantages.

La foi en Ramini n’était point particulière aux tribus de la province d’Anossi. Elle était partagée par la grande et puissante nation des Sakalaves, qui occupe tout le nord-ouest de Madagascar sur les rives du canal de Mozambique ; elle était implantée chez les Zaffi-Rabès, les Sambarives, les Bétimsaras, les Bétanimènes et parmi foule d’autres peuplades. La race pure de Ramini s’était abâtardie dans toutes les tribus qui s’en disaient issues ; mais, par un bizarre concours de circonstances, Béniowski, depuis sa première apparition au Fort-Dauphin, en avait été proclamé le seul et unique descendant direct, de mâle en mâle, sans mélange de sang.

Les joueurs d’herravou le chantaient.

Enfin d’anciennes prophéties annonçaient « un changement général dans le gouvernement de l’île et disaient que le descendant de Ramini rebâtirait la ville de Palmyre[1]. »

Quelle était cette ville de Palmyre qu’on ne s’attendrait guère à trouver dans une prédiction malgache ?

Toujours est-il que Béniowski n’était plus libre de reculer devant la qualité de descendant de Ramini.

L’audacieux Siloulout se leva et dit :

— Les chefs prudents d’Antimaroa déclarent que si tu te retranches derrière des palissades armées de canons, c’est toi

  1. Mémoires de Béniowski, tome II, page 311.