Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/183

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« – Nous le jurons !… nous le jurons ! répondirent toutes les insulaires.

« – Jurez d’être mères comme les femelles des animaux qui n’abandonnent jamais leurs petits !… Jurez d’avoir pitié du fruit de vos entrailles et de résister par la force, s’il le faut, à quiconque essaierait de rétablir la coutume du démon !…

« – Nous le jurons !… mère des Malgaches, nous te le jurons !…

« – Et moi je jure que la protection de mon mari et de ses soldats est acquise à toute mère qui la réclamerait pour sauver son enfant !… Non ! les Français ne sont venus ici pour détruire ni pour asservir votre race !… Les Français affranchissent leurs prisonniers de guerre… Et la comtesse de Béniowski vous dit : Laissez croître et multiplier les Malgaches afin qu’ils forment un grand peuple invincible sous le règne d’un chef juste et indulgent ! »

« Alors une vieille mulâtresse qui avait passé plus de trente ans à l’Île-de-France et que l’on ne connaissait plus dans son propre pays, s’avança et dit avec l’accent de la passion :

« – J’ai été la femme du plus illustre chef des Malgaches, moi, Suzanne, hier esclave, aujourd’hui libre sur la terre de mes ancêtres, grâce au général et à sa compagne. »

« Un profond silence, produit par l’étonnement et la curiosité générale, régna soudain dans l’assemblée.

« – Je suis la veuve de Ramini-Larizon Ompiandrian des Sambarives, qui fut massacré par les pères de Mahertomp, de Raboët, de Campan et de Siloulout. J’ai été réduite en esclavage et vendue comme une bête de somme, tandis que les assassins se partageaient le royaume de mon époux !… Malheur sur eux !… Malheur sur moi-même !… Tous mes fils vinrent au monde en des jours mauvais, et moi, je sacrifiai tous mes fils à votre coutume maudite !… Je suis vieille aujourd’hui, pauvre et sans