— Oh ! ne vous éloignez pas, Mademoiselle, reprit vivement Béniowski ; laissez-moi vous dire quelques strophes de ce chant que votre présence me rappelle. Je me sens mieux ; ma fièvre se calme ; mon sang est rafraîchi par les touchants souvenirs que votre présence éveille en moi.
— Je vous écoute, monsieur le comte, murmura Salomée en rougissant.
Béniowski, avec un accent tour à tour énergique et tendre, déclama aussitôt :
« Quel démon a mis le glaive des combats dans la main de Wenceslas ? – Quel démon a mis, dans son âme, les fureurs de la haine et des massacres ? dans sa bouche, les malédictions et les menaces de mort ?
« Haïr, c’est souffrir !…
« Wenceslas souffre comme un damné dans l’enfer.
« – Oublie et pardonne ! – lui disait la voix de l’ange.
« Mais Wenceslas est sourd. Il ne veut rien oublier, il a soif de vengeance.
« Voyez ! il revêt son armure, couverte par son manteau rouge de sang :
« – À mes ennemis, haine ! guerre et malheur !
« Malheur sur lui-même, haïr c’est souffrir !
« Et l’ange du pardon s’éloignait en pleurant :
« – Dans ce cœur rempli par la haine, il n’y a plus de place pour l’amour ! »
« Quel ange a mis la palme de paix dans la main d’Hedwige ? Quel ange a mis, dans son âme, le don de la tendresse et des consolations ? dans sa bouche les bénédictions et les paroles de vie ?
« Aimer, c’est jouir du bonheur !
« Hedwige est heureuse comme une sainte dans le ciel.