Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome premier, 1796.djvu/170

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i^/f Traita

par accident qu’ils peuvent fe furprendre dans un état malheureux. 11 y en a d’autres ( & malheureufemcnt c’eft le plus grand nombre ) "a qui il faut fans-ceffe des plaifirs nouveaux , tous plus piquants les uns que les autres ; mais ceux - là ne l’ont heureux que par accident , comme celui que la mufique, le vin , ou l’opium réjouit ; & il n’arrive que trop fréquemment que le dégoût & le repentir fuivent de près ce plaiiir charmant , qu’on regardoit comme le fcul bien re’cl , comme le feul dieu digne de tous nos hommages & nos facrifices. L’homme n’ell : donc pas fait pour être parfaitement heureux. S’il l’eit , c’eft quelquefois ; le bonheur fe préfente comme la vérité, par hafard , au moment qu’on s’y attend le moins. Cependant il faut fe foiimettre à h rigueur de fon état , & fe fcrvir , s’il fe peut , de toute la force de fa râifon , pour en foutenir le fardeau. Ces moyens ne procurent pas le bonheur , mais ils accoutument à s’en paffer, &, comme on dit , à prendre patience , à faire de néccffité, vertu. Ces courtes réflexions fur le bonheur m’ont dégoûté de tant de^ traités du même fujet, où le llyle eft compté pour les chofes ; où l’efprit tient lieu de bon fens , où l’on éblouit par le preftige d’une frivole éloquence , faute de raifonnemens folides ; où enfin on fe jette à corps perdu dans fambiticufe mctaphylique , parce qu’on n’cft pas phyficien. La phyiique feule peut abréger