Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome premier, 1796.djvu/34

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tomber en des contradictions ſi barbares avec leurs frères.

Le moyen de ſouſcrire aux moindres inconvéniens d’une ſcience qui a mérité le ſuffrage & la vénération des plus grands hommes de tous les ſiecles ! Les matérialiſtes ont beau prouver que l’homme n’eſt qu’une machine, le peuple[1] n’en croira jamais rien. Le même inſtinct qui le retient à la vie, lui donne aſſez de vanité pour croire ſon ame immortelle, & il eſt trop fou & trop ignorant pour jamais dédaigner cette vérité-là.

J’ai beau inviter ce malheureux à n’avoir point de remords d’un crime dans lequel il a été entraîné, comme en l’eſt ſur-tout par ce qu’on nomme premier mouvement ; il en aura cependant, il en ſera pourſuivi ; on ne ſe dépouille point ſur une ſimple lecture, de principes ſi accoutumés, qu’on les prend naturels. La conſcience ne ſe racornit qu’à force de ſcélérateſſe & d’infamie, pour leſquelles, loin d’y inviter, à dieu ne plaiſe ! j’ai tâché d’inſpirer toute l’horreur dont je ſuis moi-même pénétré. Ainſi chanſons pour

  1. Quel ſi grand mal, quand il le croiroit ? Graces à la ſévérité des loix, il pourroit être Spinoſiſte ſans que la ſociété eût rien à craindre de la deſtruction des autels, où ſemble conduire ce hardi ſyſtême.