Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome premier, 1796.djvu/41

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Préliminaire. 2J

Ce n’eii : qu’aux efprits déjà éclairés , que la philofophie peut fc communiquer ; elle n’cil nullement à craindre pouf ceux-là , comme on l’a vu. Elle paffe cent coudées par-deiTus les autres têtes, où elle n’entre pas plus que le jour dans un noir C-ichot.

Mais voyons en quoi confifle l’cffcnce de la fameufe difpute qui rcgne en morale entre les philofophes & ceux qui ne le l’ont pas. Chofe furprenante !

Il ne s’agit que d’une fimple difcindion , 

diftindiun folide , quoique icholaftique ; elle feule , qui l’eût cru ? peut mettre fin à ces efpeces de guerres civiles , ôz réconcilier tous nos ennemis : je m’explique. Il n’y a rien d’abfolument injulie. Nulle équité réelle, nuls vices, nulle grandeur, nuls crimes abfolus. Politiques , religionnaires , accordez cette vérité aux philofophes , & ne vous laifTez pas forcer dans des retranchements où vous ferez honteufemcnt défaits. Convenez de bonne foi que celui-là eft jufte , qui pefe la juflice , peur ainfi dire , au poids de la fociété ; & à leur tour, les philofophes vous accorderont (dans quel tem.ps l’ont-ils nié ?) que telle aclion efl relativement jufte ou injuile, honnête ou déshonnête , vicieufc Gu vertueufe , louable , infâme , criminelle , ôcc. Qui vous difpute la néceffité de toutes ces belles relations arbitraires ? Qui vous dit que vous n’avez pas raifon d’avoir imaginé une autre vie, & tout