Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome premier, 1796.djvu/76

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6ô Discours

mieux ; ou les Ovides modernes porteront avec leurs ioupirs vos cruels traitements à la poflérité indignée , qui ne leur refufera ni larmes ni fufFrage. Er comment pourroit-elle , fans ingratitude , lire d’un œil ilc les trifics & les complaintes de beaux efprits , qui n’ont été malheureux que parce qu’ils ont travaillé pour elle ?

Mais ne peut-on chercher rimmortalité, fans fe perdre ? Et quelle cft cette folle yvrcflë où je me laifTe emporter ! Oui, il eltun milieu jufte & rai-’ fonnable ( Ejî modus in rcbus , &c. ) , dont la prudence ne permet pas qu’on s’écarte. Auteurs à qui la plus flatteufe vengeance ne fuffit point, je veux dire rapplaudiflemeur de l’Europe éclairée , voulez-vous faire impunément des ouvrages immortels ?

Penfez tout haut, mais cachez (i) vous. Que 

(i) C’efl !a néceffité de me cacher, qui m’a fait imaginer la dtdicact h M. Halltr. Je fens que c’eft une double extravagance de dédier amicalement un livre auili hardi que i’ Homme-Machine ^ à un favant que je n’ai jamais vu, & que 50 ans n’ont pu délivrer de tous les préjugés de l’enfance ; mais je ne croyois pas que mon llyle m’eut trahi. Je dcvrois peut-être fupprimer une picce qui a fait tant crier, gémir , renier celui à qui elle eft adreflee ; mais elle a reçu de fi grands éloi'>-es publics d’écrivains , dont le ruffrao ;e eft infiniment flatteur, que je n’ai pas eu ce courage.