Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome second, 1796.djvu/124

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

fient , jufqu’à s’y perdre enfin. On ne peut plus le* fuivre, ils fe dérobent aux meilleures loupes ; aux plus fubtiles in jeétions ; il n’y a point d’art connu pour les débrouiller & les découvrir ; on ne fait , & vraifemblablement on ignorera toujours ce qu’ils deviennent. Mais comme tout ce qui prend vie dans les animaux fent la moindre piquure , il eft probable que ces organes du mouvement & du fentiment , ou fe changent en fibres grêles mufculeufes, ( qui alors feroient conféquemment une vraie prolongation des nerfs, comme les poils, ) ou pénètrent tellement ces fibres , & s’entrelacent fi bien avec elles , qu’il n’eft pas poflible de trouver un feul point dans un mufcle , dont le fenti-* ment ne manifefte pas la préfence ou le mélange du nerf ; & c’eft aufli à-peu-près ce que penfent les anatomiftes les plus fceptiques. Je n’en connois point qui le foient plus que le célèbre auteur de ces planches immortelles , qui ont rejette dans l’oubli celles-là même qu’il en avoit fi favamment tirées.

Telle eft la force qui contrarie les mufcles , & le chemin que la volonté , & fouvent à la vérité la machine même , lui fait faire. On juge aifément que ce chemin étant libre & ouvert depuis le commencement jufqu’à la fin, on juge, dis-je, que le fuc nerveux peut fans nul délai , & même fans aucun intervalle detemps fenfible, se rendre,