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Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome second, 1796.djvu/209

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ment pour être tirés de l’obſcurité où sont condamnés des auteurs qui ſe mêlent de littérature, ſans en être plus inſtruits, que de ma conduite & de mes mœurs. Mais dans l’extrait dont je parle, je ſuis fort mal mené, m’écrivent mes amis d’Amſterdam. Je le crois bien, leur ai-je répondu, car j’y ſuis calomnié ; & moi qui n’ai que médit, pour jetter mes confreres en meilleur moule, je ne les ai pas moins mal menés. J’ai paſſé les bornes de la critique envers les autres, & on a paſſé envers moi les bornes de la médiſance : voilà à quoi ſe réduit tout le grand mal qu’on ma fait. Je ſuis bien aiſe que mes ennemis ſoient plus coupables que moi.

Au reſte les opinions d’autrui ſont auſſi étrangeres à mon être, que ce qu’un autre ſent eſt différent de ce que je ſens. À coup ſûr, celui qui me mépriſe, ne penſe pas comme moi ſur mon compte, & celui qui me loue, ne me loue peut-être pas tant que moi-même. Un connoiſſeur qui lit un ouvrage, en juge par la juſte balance, où il le peſe ; l’auteur ſeule l’eſtime plus que ſon poids. Je m’arrête à ce dilemme, & les médecins auroient bien fait de s’y tenir auſſi. Ou les idées qu’on a de moi ſont vraies, ou elles font fauſſes. Si elles ſont vraies, c’eſt à moi de me corriger, ſuppoſé que je reconnoiſſe avoir tort. Si elles ſont fauſſes, omnis homo mendax, ce n’eſt qu’une