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Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome second, 1796.djvu/92

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muet peut-il fe faire entendre ! quelle expreflïon naïve & ingénue ! quelle énergie dont tout le monde eft frappé , que tout le monde comprend , mifes en regard de fons arbitraires, qui battent l’air, & n’expriment rien pour l’étranger qui les entend ! quoi faut- il donc parler pour paroître fentir & refléchir ? Parle aflez, qui montre du fen riment. Première preuve de lame des animaux. La parfaire analogie qui eft entr’eux & nous, fournit la féconde , & la démontre ; c eft la confcience intime qu’ils ont , comme nous , de leurs propres fenfations.

Si on pouvoit être auteur, fans faire, comme le pieux Rollin , un étalage de ce qu’on fait , & de ce qu’on ne fait pas, en faudroit-il davantige pour être en droit de conclure qu’il y a autant d’injuftice à refafer une ame aux animaux, qu’il y en auroit à eux, à ne pas reconnoître la nôtre, avec toute (à fupériorité ?

Pourfuivons donc, puifqu’il eft écrit qu’il y aura toujours des auteurs , c’ett-à-dire , des gens dont la profeflion eft de samufer à retourner le nez de cire , & comme l’habit des fciences , pour faire de la même matière fans ceflè remaniée & remâchée , un livre d’une forme , non-feulement préfentable aux leâeurs , mais aux libraires , qui comme [1] le

  1. Temple du Goût.