Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome second, 1796.djvu/94

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

il fuffit que le deflein relie tracé fur cette tunique , jufqu’à ce qu’il foit effacé par un nouveau coloris. Tant que les peintures font fur cette membrane , lame les voit fans autre intercefiion lorfqu’elles n’y font plus , elle s’en fouvient. Voilà tout le myftere.

Remarquez , s’il vous plaît, que pour bien juger des objets , il ne faut en être , ni trop loin , ni trop près. Voulez- vous que les mêmes images peintes fur la rétine , le foient aufli dans le cerveau ? Vous rifquez d’éblouir l’ame par la force de la réverbération. Plus fenfible qu’aucun thermomètre, elle monteroit, s’agiteroit , et fortiroit de cette aiïiette tranquille qui fait fon fang-froid. Il n’y auroit plus de philofophes : tous les hommes feroient enthoufiaftes, efpeced’épileptiques faciles à connoître à 1 écume qui leur vient à la bouche , à la moindre opinion hardie ; toujours sûre de leur déplaire , dès qu’elle les contredit & : bleffe leur amourrpropre.

Comme l’œil ne fe voit point dans un miroir trop proche de lui , l’ame ne pourroit voir des images qui le toucheroient. Ceft pourquoi le prudent médecin de Breflaua jugé à propos de reculer le foyer de la vifion. Ceft bien fait, grand dofteur ! L’ame eft fi diftinde du corps, qu’on peut bien l’ifoler & la détacher des pièces néceflaires à l’ouvrage de sa mission ; outre qu’il eft dangereux qu’un corps