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DE LA VERTU DES PAY. II. PART.


remarquent expreſſement, qu’on ne l’avoit jamais vû dans ce miſèrable état. Et je ne puis rien rapporter de plus exprès pour juſtifier la calomnie de cette accuſation ; que ce qu’obſerve dans ſa vie, Diogene, touchant la peſte, qui travailloit ſouvent la ville d’Athenes. ll dit, que Soerate ſut quaſi le ſeul, qui s’en exemta de ſon tems par ſa grande ſobrieté, & pour être le plus temperant des hommes en ſon boire, & en fon manger.

L’amour maſculin eſt un crime beaucoup plus atroce, puiſqu’il eſt abominable, & s’il faloit avoir égard au ſens qu’on a donné au Proverbe de la Foi Socratique, & aux apparences de la paſſion dont il étoit touché pour Alcibiade, j’avoue qu’il ſeroit fort difficile de l’excuſer. Mais s’il faut juger plus ſainement des choſes, c’eſt de l’Amour même que nous tirerons ſon plus grand mérite. Car jamais homme ne fit profeſſion d’affetionner le genre humain avec tant d’ardeur que lui. Mais c’étoit pour lui imprimer l’amour de la vertu, le retirer du vice, & le porter à la recherche de cette belle Philoſophie, qui lui devoit donner la connoiſſance d’un ſeul Dieu. De là vient, que Socrate ſait gloire dans Xenophon d’être un excellent