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DE LA VERTU DES PAY. II. PART.


dire, que c’eſt dommage, qu’elle ait été Paienne, & qu’un Rénegat, le plus dangereux perſecuteur peut-être, que l’Egliſe ſouffrit jamais, s’en ſoit trouvé revétu. Mais c’eſt ici qu’il faut donner des bornes à nôtre raiſonnement, captiver nôtre eſprit, & lui faire admirer avec ſoûmiſſion la profondeur des jugemens de DIEU.

Il y a bien de quoi s’étonner après ce recit Hiſtorique, de voir, qu’on veuille faire pasſer Julien pour un homme lache & ſans cœur, comme Saint Cyrille entre autres le nomme une infinité de fois dans le dixiéme des livres qu’il a compoſés contre lui. Et que celui, qui eſt mort les armes au poing avec un courage d’Epaminondas, après avoir gagné les victoires ſur le Rhin, comparées à celles d’Alexandre ſur le Granique, ſoit repréſenté comme un fainéant & un poltron. Que ſi nous loüons le zèle de ceux, qui ont parlé de lui de la ſorte, à cauſe des legitimes mouvemens, qu’ils ont eus de leur tems, cela n’empêche pas, qu’au nôtre nous ne puisſions, ſans offenſer la pieté, ſuivre en cela ce qui eſt le plus vraiſemblable.

Le reproche qu’on lui fait d’inexperience, & de mauvaiſe conduite, n’eſt peut-être pas plus conſidérable. On le fonde ſur ce qu’il fit brûler imprudemment preſque toutes les