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DE IULIEN


barques, qu’il avoit ſur le fleuve du Tigre, pour entrer plus avant dans le païs du Roi de Perſe, ſe fiant au conſeil d’un Traitre, qui fut cauſe de la perte de toute l’armée Romaine. Or bien qu’il ſoit vrai, que le chemin vers les montagnes lui fut indiqué par quelques Perſans, qui confeſſèrent leur trahiſon à la torture, comme le texte d’Ammien le porte[1] ; il eſt faux néanmoins, que l’incendie des vaisſeaux ſe fit à la perſuaſion de ce frauduleux Sinon, dont on parle, qui ne ſe préſenta devant Julien, qu’après qu’ils fûrent brûlés, ſelon qu’on peut le voir dans Nicephore. Et Zoſime dit expreſſément[2], que ce fut un avis, que prit l’Empereur par une mûre déliberation, encore que l’évenement l’ait fait depuis trouver mauvaiſe. En effet, il ſe reſolut à cela, pour ſe prévaloir de bien vint mille hommes, qui étoient occupés à la conduite, & à la garde de ſa flotte. Il craignoit d’ailleurs, qu’elle ne tombât entre les mains de ſes ennemis, qui s’en fuſſent prévalus contre lui. Et peut-être, qu’aiant arrêté de prendre un nouveau chemin, il vouloit ôter toute penſée à ſes ſoldats de revenir vers la riviere, & leur donner plus de réſolution à ſurmonter les difficultés de la route, qu’il avoit deſſein de tenir. Et quoi ? n’eſt ce pas ſur le même

  1. Lib. 24.
  2. Lib. 10. cap. 33. lib. 3.
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