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DE LA VERTU DES PAYENS.


il montre clairement[1] que les Gentils ont pû arriver à la grace du Ciel par leur bonne vie, auſſi bien que les Juifs. Et quand il a jugé la Sibylle Erythrée digne d’être placée dans la Cité de Dieu, il ſemble s’être aſſez expliqué ſur ce ſujet[2], auſſi bien qu’Eusèbe, & les autres qui ont eu la même opinion de quelques Sibylles. Ce n’eſt pas que le même St. Auguſtin, & aſſez d’autres Pères n’aient ſouvent déclamé contre ceux, qui penſoient que les bonnes œuvres fuſſent ſuffiſantes toutes ſeules pour nous juſtifier devant Dieu. Mais ce n’a été que pour s’oppoſer à l’Hereſie Pelagienne, qui donnoit trop aux forces du franc-arbitre, ou aux mérites de nos actions ; & cette opinion du ſalut des Gentils moiennant l’aſſiſtance de la grace.

Saint Thomas (i)[3] interprétant le paſſage du

    quam eſt ceu quis viator mandatam chartæ itineris ſui rationem gerat, ac veluti formam ; alter memoriæ fidat ac judicio. Idem etiam noſtro tempore continget ei, qui cum nihil de Chriſto in remotiſſimis Oceani partibus natus audierit, duo illa maxima ſervaverit mandata, in quibus Veritas ipſa legem totam Prophetaſque conſtitutos affirmavit, de Deo & proximo diligendis. Huic ſua conſcientia eſt lex, &c. Il faut ajoûter un autre endroit du même livre de Saint Auguſtin, chapitre vint troiſiéme, parce
    que je l’ai cotté au ſujet de la Sibylle Erythrée. Haec autem Sibylla ſive Erythraca, five, ut quidam credunt, Cumana, ita nihil habet in toto carmine ſuo, quod ad Deorum falſorum ſive fictorum cultum pertineat : quinimo ita etiam contra eos, & contra cultores eorum loquitur, ut in eorum numero deputanda videatur, qui pertinent ad civitatem Dei.

  1. ad Apol. 2. Inſt. Mart.
  2. Lib. 18. c. 23.
  3. (i) l’ai cité un trop grand nombre de paſſages de Saint Thomas ; pour les rapporter tous ici. Il me ſuffira de trois