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comme le représente par exemple la figure 3, où le rayon lumineux est représenté par la ligne LMNR.

Fig. 3.

Cette trajectoire n’a rien pour la définir que les lois infiniment variables de la répartition dû la quantité d’humidité et de la quantité de chaleur. La seconde, beaucoup plus grave, c’est de s’imaginer qu’il y a dans les lois de la réfraction une sorte de compensation, telle qu’on n’est pas obligé de tenir compte de l’état hygrométrique de l’air, car, si la vapeur d’eau introduit un pouvoir réfringent plus grand, elle produit, d’autre part, une raréfaction de l’air ; cette chimérique compensation, imaginée par suite d’expériences incomplètes de Biot et d’Arago, est ruinée par les phénomènes de mirage. L’expérience suivante de Wollaston, qu’il est facile de répéter, ne laisse point de prise au plus léger doute. En faisant évaporer de l’eau sur une plaque de dix pieds de longueur, et en visant un objet éloigné lumineux, on voit un déplacement appréciable : l’image est relevée (Fig. 4).

Fig. 4. — Mirage artificiel de Wollaston.

Ces phénomènes se constatent mieux, en faisant évaporer de l’alcool et surtout de l’éther répandus sur une planche ou une plaque de verre de dimension moindre. En augmentant la rapidité de l’évaporation, on s’aperçoit facilement que la déviation augmente. Les images interverties, vues au-dessus de la mer à petite distance, n’ont point d’autre cause. C’est un phénomène analogue à celui qu’on produit artificiellement avec une petite quantité d’éther, et qui dans la nature demande un espace beaucoup plus grand, parce que la différence du pouvoir réfringent de la vapeur d’eau et de l’air est infiniment plus faible que celle de l’air et de l’éther vaporisé.

Nous terminerons en faisant remarquer que bien des fois, dans les opérations géodésiques, on a aperçu des changements dans le résultat des visées pour les points lointains. Nous avons même lu, quelque part, qu’on se proposait de tirer des conclusions météorologiques de ces déplacements des images. Nous serons heureux de voir qu’on donne suite à un projet si utile, non-seulement pour le progrès de la géodésie, mais encore pour celui de la physique elle-même, car les circonstances multiples dans lesquelles se produisent les mirages ne tarderont point à être élucidées.

W. de Fonvielle.

LES WAGONS-AMBULANCES

Les changements introduits dans l’art militaire par l’emploi des armes à longue portée ont amené, un double résultat qu’il est impossible de méconnaître : la diminution du nombre des morts et l’augmentation de celui des blessés restés sur le champ de bataille. Une pensée généreuse, bien digne d’un siècle de progrès, fut de chercher à sauver, en temps utile, ces malheureuses victimes de la guerre par une organisation efficace des sociétés de secours. — Il appartient à l’Amérique d’avoir eu, en avril 1861, la première idée sérieuse d’une association de ce genre. Depuis cette époque, des progrès de toute sorte ont été apportés à la grande œuvre philanthropique, pour laquelle les différentes nations ont rivalisé de zèle.
— Nous n’avons pas à décrire ici les nombreux appareils destinés au sauvetage des blessés ; le sujet est vaste et donnerait lieu à de trop longs développements. Toutefois nos lecteurs verront peut-être avec quelque intérêt certains détails sur un point important de la question : le transport rapide des blessés sur les chemins de fer, au moyen de wagons spéciaux, pourvus de tout le confortable nécessaire à des malades.

Les wagons-ambulances ont été employés, pour la première fois, en Amérique, pendant la guerre de la sécession. Les champs de bataille des États-Unis étaient encombrés de blessés, dont l’agglomération eût amené des résultats désastreux au point de vue hygiénique, si l’on n’avait pris des mesures pour les éloigner de ces centres d’infection. Il ne fallait assurément pas songer à placer dans des voitures ordinaires, si commodes qu’elles pussent être, des hommes amputés ou atteints de blessures graves ; les wagons à voyageurs furent donc réservés aux soldats que le peu de gravité de leur état permettait de transporter ainsi sans inconvénient. Quant aux autres, le problème consistait à trouver un moyen de les soustraire aux fatigues de la route et aux intempéries des saisons, en créant pour eux de véritables dortoirs roulants. Une des principales difficultés d’exécution résidait dans l’aménagement des lits ; il