Page:La Réforme sociale, série 3, tome 5, 1893.djvu/187

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catéchisme étaient lacérés dans des établissements d’instruction primaire.

Et ces hommes nouveaux, aveuglés par l’ivresse d’un triomphe inespéré, étourdis par cette ronde de millions qui semblent passer de mains en mains au milieu des cris de la Bourse, enfiévrés par les chiffres fantastiques, invraisemblables, qui s’énoncent froidement dans le monde des affaires, crurent, pour quelques-uns, que la fortune facile s’ouvrait pour eux en même temps que la puissance, que des gains prodigieux offerts sans cause, obtenus sans labeur, étaient chose licite et normale, et l’oblitération du sens moral, l’affaissement de toute délicatesse devinrent si complets que, du haut de la tribune française, la corruption fut érigée en système de gouvernement et que l’emploi du bien d’autrui fait à l’insu du propriétaire dans un intérêt de parti parut un acte habile et justifiable.

Quel retour sur eux-mêmes doivent faire ceux qui professaient que la pauvre et fragile conscience humaine peut, sans soutien, se maintenir à travers les tentations dans la voie stricte du devoir ! La morale indépendante, qu’ils préconisaient, vient de faire ses preuves ; c’est son procès qui s’instruit en ce moment ; c’est sa condamnation en dernier ressort qui doit mettre fin à ce mauvais rêve.

Mais longtemps encore le souvenir en pèsera lourdement sur ceux dont les efforts constants tendent à rétablir la paix sociale et à calmer l’antagonisme des classes. À l’heure précise où les revendications de la masse ouvrière se formulent avec le plus d’âpreté, où retentit dans toutes les réunions populaires l’appel à la violence et à la propagande par l’action, combien les agitateurs ne seront-ils pas empressés à généraliser les faits et à fomenter les haines. En qui, désormais, ce monde du travail, abusé par les plus mensongères doctrines, pourra-t-il placer sa confiance et son espoir ? Où, comment trouvera-t-on les moyens de calmer ces colères ?

Ne désespérons pas, le salut nous est montré : par-dessus ce désarroi profond une voix s’est élevée, sereine, harmonieuse, impassible et a dominé le tumulte et les imprécations précurseurs des luttes fratricides pour tracer à chacun son devoir. Le Souverain Pontife, avec l’autorité qui est sienne, a, dans son Encyclique sur la condition des ouvriers, condamné courageusement les doctrines sociales qui cherchent un remède dans le renversement de la so-