Page:La Retraite de Laguna (Plon 1891).djvu/274

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Depuis notre dernière halte, nous traversions des taillis épais où nos soldats, n’ayant plus à craindre les attaques de la cavalerie, marchaient avec assurance plus écartés les uns des autres ; nous savions ne devoir retrouver la plaine découverte qu’à partir de Canindé. Ce fut à deux heures de l’après-midi que nous aperçûmes le bois qui porte ce nom, comme la rivière qui le traverse, et nous y arrivâmes à trois heures, ayant franchi une distance de sept lieues : sujet d’étonnement pour tout le monde dans l’état de faiblesse où nous étions.

Au passage de l’eau, on trouva le cadavre d’un conducteur de chariots, nommé Apollinaire, que les Paraguéens venaient de tuer. Il était du convoi de ces marchands qui s’étaient arrêtés à la Machorra, en attendant des nouvelles, et qui, au bruit de nos combats du 8 et du 9 mai, après lesquels on nous tenait pour perdus, n’avaient plus songé qu’à retourner sur leurs pas. Il leur avait fallu vingt jours pour regagner Canindé, où ils rencontrèrent des éleveurs de bétail qui devaient nous y faire la remise d’un troupeau ; mais avant notre arrivée, les uns et les autres étaient tombés aux mains de l’ennemi.