Page:La Revue blanche, t12, 1897.djvu/291

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À côté de l’idée communale, la Commune eut sa conception de l’armée. Cette conception oscille entre la constitution des milices résidant dans leur région d’origine et n’étant à vrai dire que la population mâle armée, et les corps régionaux avec court service. Le court service et l’armement général avec appel par bans, acceptés et pratiqués en partie par les conseils militaires depuis le remaniement de la première réorganisation de l’armée, se rapprochent de l’organisme communal au moins en quelques points. Il n’est pas impossible que l’on accepte un jour les corps régionaux.

Quant aux rapports de la Commune avec les organisations religieuses et notamment avec l’Eglise dominante, l’ultramontaine, ils se sont dès la première heure ressentis du concours que les évêques et tout le clergé avaient donné avec le plus immoral empressement au gouvernement issu du Deux-Décembre. M. Darboy a payé pour M. Sibour et tous ces prêtres indignes qui ont salué un président de république parjure et meurtrier. Mais ce point de vue particulier mis à part, il reste qu’à cette date la démocratie tenait l’idée religieuse s’exprimant par le personnel et le culte comme incompatible avec le développement politique d’une démocratie et surtout l’éducation publique des générations nouvelles. Malgré l’habile évolution du successeur de Pie IX il paraît bien que cette conviction fondamentale subsiste dans le pays républicain. Les manifestations confuses et contradictoires qui viennent de se produire à l’occasion de l’élection du successeur de M. d’Hulst confirment plutôt qu’elles n’infirment cette impression.

Venons enfin à l’idée sociale du mouvement. Les écoles à cette date étaient moins accusées, moins conscientes qu’aujourd’hui. Mais la tendance et la volonté populaires sont très nettement en relief. La révolution du 18 mars a été ouvrière dans ses instruments ; c’étaient les travailleurs qui la criaient et l’appuyaient ; leur vote et leur fusil étaient à elle. Les deux mois de Commune ont été des journées ouvrières. Le but social est visible, moins le détail des moyens impossible à discuter au milieu du tumulte et de la fumée de poudre. Partout les démocraties ouvrières ont donné cette signification au mouvement ; dans les grandes villes industrielles d’Allemagne et des États-Unis du Nord-Amérique comme dans les centres manufacturiers de l’Angleterre et de la Haute-Italie l’impression subsiste. Les gouvernements qui méconnaîtraient ce sentiment public et général feraient plus que fausse route ; les nations et les gouvernements pour qui le souci des besoins de la démocratie ouvrière n’est pas d’ailleurs une préoccupation allant jusqu’à l’obsession ne peuvent vivre. Les prolétariats sont la base, les assises de tout grand peuple : il faut qu’ils soient sains et forts. Il n’aura pas tenu à la Commune que cette préoccupation ne soit la première entre toutes à la fin de ce siècle.

À ces points de vue divers et qui suffisent — il faut au reste savoir se borner — la traînée lumineuse laissée par la Commune de 1871