Page:La Revue blanche, t27, 1902.djvu/264

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Nous venons de voir la situation de l’ouvrière de la couture. Descendons encore et pénétrons dans un nouveau cercle de cet enfer industriel.

La confection. — Rappelons que la confection est le procédé industriel qui consiste à fabriquer d’avance, par grandes quantités, le vêtement (manteaux, mantelets, pèlerines, jaquettes, jerseys, etc.) tout ce qui recouvre le costume (jupe et corsage-), mais que ce mot désigne aussi, accessoirement, ce qui s’applique au costume.

L’ouvrière travaille ici pour le compte d’un entrepreneur. On distingue les entrepreneurs qui dépendent des maisons de gros et les entrepreneurs qui dépendent des maisons de détail.

L’entrepreneur est tantôt un riche industriel qui agglomère son personnel dans un atelier, tantôt un distributeur d’ouvrage, tantôt une ouvrière en chambre qui « fait travailler ».

Nous allons citer quelques exemples de cette exploitation effrénée, d’après les monographies de l’enquête officielle.

Dans une maison de gros du quartier de la Bourse, où l’on confectionne des pèlerines, des peignoirs, des jaquettes et des jerseys à l’atelier et au dehors, nous relevons :

50 entrepreneuses (peignoirs,
jaquettes et pèlerines)
      aux pièces :
peignoirs : de 0 fr. 25 à 0 fr. 40
jaquette extraforcée : 0 fr. 60
pèlerine astrakan doublée :
        de 0 fr. 15 et 0 fr. 20.

Ces entrepreneuses ou intermédiaires gardent pour elles de 0 fr. 05 à 0 fr. 10 par pièce. Elles donnent l’ouvrage à emporter à des ouvrières qui travaillent chez elles et peuvent gagner de 1 franc à 1 fr. 25 par jour.

Entrepreneuses de jerseys
      aux pièces :
jersey : 0 fr. 60
jersey ourlé : 0 fr. 45.

Les boutonnières sont faites par des ouvrières spéciales qui gagnent de 0 fr. 90 à 1 franc par 100 boutonnières et emportent l’ouvrage chez elles. Leur gain par semaine peut atteindre de 15 à 20 francs environ.

À l’atelier de la même maison, une ouvrière presseuse gagne 2 fr. 50 par jour (elle remplace un ouvrier presseur qui gagnait 7 francs par jour), mais ne travaille que six mois de l’année.

Dans une fabrique collective du quartier de la Santé, où l’on fabrique des jaquettes et collets-dames confection pendant 6 ou 7 mois de l’année, le salaire total de chaque ouvrière est de 12 à 15 francs par semaine, en moyenne ; 6 francs par semaine en petite saison. Augmentation de 2 francs par semaine en cas de veillée. L’ouvrière fournit le fil et les aiguilles (maximum 0 fr. 35 par jour, surtout lorsqu’il s’agit d’acheter des fils et cordonnets de couleur pour jaquette fantaisie).