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Page:La Revue des revues de 1890 à 1900, 1899, T3.djvu/139

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du sujet qu’aux exceptionnelles qualités de style, débute par une note fantaisiste.

Quel homme de l’histoire proposeriez-vous comme modèle à nos fils ?

Don Quichotte.

Jean Laurenty.

Mme Marni, qui a su enfermer la philosophie amère des désenchantements psychologiques de l’heure présente dans des scènes courtes vile devenues célèbres et dans lesquelles elle rappelle la netteté de La Rochefoucauld, exprimée en des dialogues égalant, pour le moins, la cinglante ironie de Lavedan, a voulu nous prouver une fois de plus que la femme d’esprit égalait chez elle la penseuse et elle nous propose Saint Louis en faisant appuyer son choix… par Voltaire.

Louveciennes (Seine-et-Oise).
Madame,

Vous me faites l’honneur de me poser cette question : « Quel homme de l’histoire proposeriez-vous comme modèle à nos fils » ? Si je n’avais quelque crainte que nos fils n’exigeassent de leurs. mères les vertus d’une Blanche de Castille, je leur proposerais Saint Louis, Saint Louis dont Voltaire a dit : « Prudent et ferme dans le conseil, intrépide dans les combats, sans être emporté, compatissant comme s’il n’avait jamais été que malheureux, il n’est guère donné à l’homme de pousser plus loin la vertu ».

Croyez, Madame, à toute ma sympathie,

J. Marni.

C’est encore avec l’opinion de Voltaire que Me Paul Junka, la romancière qui peint d’une plume si fine les tableaux dramatiques, nous offre Anne de Montmorency.

Madame,

Votre aimable question me prend fort au dépourvu n’ayant jamais et pour cause ! songé à proposer un modèle à nos fils…

Au premier abord, il semble que l’on n’ait que l’embarras du choix. Mais les plus belles humanités n’ont pas que leur côté lumineux et à moins de remonter à Aristide ou à Socrate, celui-ci présenté comme type du mari idéal ! — on hésite à fixer un modèle au sens exact de ce mot.

Si c’est une préférence historique que vous souhaitez, je peux vous dire que j’eus toujours une sympathie pour la noble figure de ce connétable Anne de Montmorency, lequel, agonisant, répondit fièrement au moine qui l’exhortait à bien mourir : « Croyez-vous qu’ayant bien vécu près de quatre-vingt-ans, je ne sache pas mourir un quart d’heure » ? et dont Voltaire a pu dire : « C’était un honnête homme, pensant avec grandeur. » Voilà, me semble-t-il, un éloge qui est de tous les temps et qu’il faut, en tant que principe directeur, désirer à nos jeunes contemporains.

Paul Junka.