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PIERRE CURIE

plusieurs plans. De cette polarisation résultent sur la surface du cristal des charges apparentes que neutralisent d’ordinaire, pour l’extérieur, des charges égales et contraires maintenues par attraction électrostatique. Mais si, par échauffement ou refroidissement, le volume du cristal vient à se modifier, la polarisation change dans le milieu, la compensation cesse de se produire, et une électrisation superficielle apparaît, de signes opposés aux deux bouts du cristal, aux deux extrémités de l’axe suivant lequel est dirigée la polarisation.

Cette modification de volume peut être produite par compression ou traction, au lieu d’une variation de température ; tout milieu pyroélectrique est, en même temps piézo-électrique. Tel est le cas pour la tourmaline.

Mais la réciproque ne peut être vraie, car la compression introduit une dissymétrie nouvelle que ne produisait pas le simple échauffement, et tel milieu, comme le quartz, qui ne présente pas de pyroélectricité à cause de ses trois axes de symétrie binaires, peut cependant devenir piézo-électrique quand on le comprime dans une direction qui ne coïncide avec aucun de ces axes ; il n’en subsiste alors aucun, ou bien un seul si la compression lui est perpendiculaire, et la polarisation peut se manifester.

Tels sont les phénomènes que les frères Curie eurent à vérifier expérimentalement.

M. Lippmann, par application des méthodes que je rappelais plus haut, conclut tout de suite à l’existence d’un phénomène inverse dont on pouvait prévoir le sens et la grandeur : la création d’un champ électrique dans une direction convenable à l’intérieur d’un cristal de quartz devait provoquer une déformation, que les deux jeunes physiciens constatèrent, bien qu’elle fût d’une extrême petitesse.

La simplicité de ces phénomènes, la rigoureuse exactitude de leurs lois expérimentales, donna aux deux frères l’idée de les utiliser pour construire un étalon de quantité d’électricité par traction connue d’un morceau de quartz donné, établissant ainsi un appareil nouveau, le quartz piézo-électrique, si précieux pour les mesures absolues en électrostatique et qui devait plus tard rendre à Pierre Curie de grands services dans les mesures relatives aux corps radioactifs.

Sur un sujet voisin, vient encore une ingénieuse explication