Page:La Revue du mois, année 6, numéros 61-66, 1911.djvu/134

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l’industrie électrique et de la télégraphie, à leur naissance, un rôle comparable à celui que s’était donné Regnault pour l’industrie thermique. Le nom de Thomson revient constamment à propos des mesures électriques, comme celui de Regnault à propos des mesures concernant la chaleur.

Ce sont encore entre autres, Bède, de Liège, Bohn, de Francfort, Lange, Auspitz, de Vienne, Christie, de Christiania, Rubinson, de Stockholm, Lubimoff, de Moscou, Blaserna, de Venise, aujourd’hui président de l’Académie royale dei Lincei à Rome, membre correspondant de l’Institut de France et sénateur du royaume d’Italie. M. Blaserna à qui j’avais transmis l’invitation d’assister à notre réunion, m’a répondu la lettre suivante :

Monsieur le professeur,

Je serais bien heureux de pouvoir assister à la belle fête que l’Administration du Collège de France prépare pour le Centenaire de mon vénéré maître V. Regnault. Mais malheureusement mes occupations au Sénat comme membre de la Commission du Budget m’empêchent de quitter Rome en ce moment où il y a plusieurs budgets à voter, y compris celui des affaires étrangères dont je suis rapporteur.
xxxx Je suis profondément touché de l’aimable invitation que je reçois à l’instant et qui me rappelle en foule des souvenirs de mon séjour au Collège de France où j’ai eu le bonheur de prendre part, pour une année, aux travaux du grand physicien. Regnault était un rude travailleur. J’allais tous les jours au laboratoire, situé au Collège de France, où Regnault avait planté un grand manomètre, et j’y restais avec lui jusqu’au soir. Les enseignements que j’y ai reçus m’ont servi de guide pour toute ma vie.
xxxx J’y fis la connaissance de son fils Henri, qui, étant tout jeune encore, montrait déjà un remarquable talent pour le dessin et pour la peinture. Dans l’été de 1861, il a bien voulu faire mon portrait à l’huile. C’était un buste, en profil, trois quarts peut-être, de grandeur naturelle. J’ai donc eu l’honneur de servir de modèle à ce jeune artiste qui était destiné à devenir si illustre en quelques années. Après sa mort, si prématurée et si glorieuse, le pauvre père se retira à la campagne, à Belley, près de Culoz, en conditions de santé déplorables. Je lui fis une visite ; il me reconnut tout de suite et se rappela très bien le portrait. Mais, à ma prière, que je lui avançai timidement, il me répondit qu’il ne pouvait se séparer de tout ce qui regardait son fils bien-aimé.
xxxx Vous voyez, cher Collègue, à quels souvenirs me porte votre aimable lettre…