Page:La Revue du mois, année 6, numéros 61-66, 1911.djvu/135

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C’est encore Soret, de Genève, chez qui Regnault, pendant et après la guerre, devait chercher un refuge loin de son laboratoire de Sèvres, investi, puis saccagé. C’est, travaillant auprès de lui à ce laboratoire de Sèvres, en particulier, M. Pfaundler, aujourd’hui professeur à l’Université de Graz, en Autriche, qui a bien voulu, pour la célébration d’aujourd’hui, à laquelle son grand âge et la grande distance ne lui permettent pas d’assister, m’envoyer les souvenirs personnels suivants :

Lorsque, en 1864, grâce à l’intervention de mon vénéré maître Ad. Wurtz, je fus admis par V. Regnault dans son laboratoire, j’eus l’impression d’une certaine ressemblance entre ce grand physicien et son maître d’un moment, Justus Liebig, dont j’avais moi-même suivi les leçons en 1861. Cependant c’est Regnault qui a le plus contribué au développement de la recherche expérimentale pure, qui a porté au plus haut degré sa prédominance sur toute théorie et est devenu par là le plus grand maître de son temps dans l’art d’expérimenter. Ses mesures sur la chaleur sont encore aujourd’hui le fondement de cette partie de la Physique. La plupart de ses résultats, aujourd’hui encore, n’ont pas été dépassés et les autres n’ont pu l’être que grâce aux méthodes qu’il avait lui-même introduites.
xxxx Il a montré avant tout comment les inévitables causes d’erreur peuvent être éliminées par le dispositif de la recherche et rendues sans effet nuisible. Sa force de travail et son endurance étaient admirables et l’accompagnèrent jusqu’à un âge avancé.
xxxx Regnault n’était pas communicatif, il parlait peu avec ses élèves et ceux-ci souvent ne pouvaient que conjecturer ce dont il s’agissait. Néanmoins, Regnault était un maître entraînant et l’on pouvait apprendre énormément de choses auprès de lui. Je me rappellerai toujours avec plaisir et reconnaissance le temps que j’ai passé dans son laboratoire de l’ancienne manufacture de porcelaine de Sèvres, à l’école de ce grand maître de la physique expérimentale. Sa gloire est assurée pour toujours.

Parmi les Français, il eut comme élèves ou préparateurs d’abord l’admirable expérimentateur que fut Léon Foucault, dont un médaillon reste encore dans mon laboratoire depuis cette époque, Bertin, plus tard directeur des études scientifiques à l’École Normale, Lissajoux, Izarn, Reiset, Descos, l’ingénieur modeste et dévoué qui l’assista dans l’établissement des appareils monumentaux exigés par certaines recherches.

Tous suivaient au Collège son enseignement qui fut remar-