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Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/108

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seul ? Quelle absurdité ! Mais je vois bien, pour cette fois, que l’amour n’est point aveugle ; l’objet que vous avez choisi pour être le suffragant de mon maître, a les qualités les plus distinguées pour être digne d’occuper sa place ; il est juste que monsieur le marquis souffre la peine du talion… Ambassadeur d’amour, je vais donc apporter l’heureuse nouvelle à votre Adonis. Mais, puisque j’ai la clef dans mes mains, — en disant cela il montre le billet qu’elle a tracé — vous me permettrez bien, madame, d’avoir le bonheur d’ouvrir, moi le premier, le temple de Cupidon ; de me prosterner devant son autel, et d’y allumer mon cierge ; autrement je cours auprès de votre époux qui est à son château, et, en domestique fidèle, je lui remets votre billet. »

Il m’est impossible de vous peindre la situation de madame. Tantôt pâle, tantôt toute en feu, confuse, éperdue, elle l’accabla d’abord des reproches les plus durs ; bientôt après, elle joignit à ses larmes les supplications les plus touchantes pour fléchir son cœur ; il tint ferme, et la malheureuse dut succomber sous le poids de l’oppresseur. Mais comme cet indigne avait bu à des sources empoisonnées, il communiqua sa maladie à madame, et celle-ci en fit un don au jeune comte.

Le mystère ne put pas rester longtemps voilé. Le comte tua de ses propres mains ce