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Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/112

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MARTHE

Oui, mademoiselle, mais mon ton badin doit se changer en sérieux.

Monsieur le baron R*** dégoûté de sa femme, trouve le moyen de se rendre aimable, ou pour mieux dire, de faire aimer son argent à une jeune demoiselle qui était belle comme on nous peint Vénus. Il sut longtemps dérober sa passion à tous les yeux, soit parce qu’il allait, déguisé avec précaution, offrir ses sacrifices nocturnes à la déesse, soit parce que cette déesse se métamorphosant en toutes sortes de figures, daignait parfois descendre jusqu’à lui. Un des domestiques du baron était seul dans le secret, lorsqu’il fallait introduire cette divinité dans son appartement. Mais, hélas ! ce domestique voulait entrer dans la même carrière, et notre nouvelle Vénus fut assez imprudente, ou assez fière, pour vouloir se tenir toujours avec son Adonis. On regarda ses refus comme des marques d’orgueil et d’ingratitude ; on pensa à la vengeance ; l’on avertit la baronne : celle-ci se mit aux aguets ; et un beau soir, à peine cet heureux couple s’était amoureusement entrelacé, qu’elle entra toute furieuse avec un commissaire qu’elle avait mandé à propos. Elle vomit contre son époux les mots les plus outrageants, épuisa toutes les épithètes les plus insultantes contre la malheureuse, et la