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Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/176

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même. Un air de froideur, un rire forcé, un engagement prétexté de se rendre chez son colonel, un prompt départ, tout devait me faire voir les soupçons qu’il avait formés sur mon compte. Ah ! le perfide ! Jamais aucun homme…

MARTHE

Jamais aucun homme ne fossoyera plus dans votre vigne, n’est-ce pas ? Vous voulez parler en enfant, je crois. Ne savez-vous pas notre proverbe : « Que le trône du roi n’est jamais vacant ? » C’est parce qu’à peine un roi est-il mort, que son successeur est bientôt proclamé.

Notre petite affaire est le trône de l’humanité : il lui faut toujours un sceptre. Si par hasard quelque bon mets vous a fait vomir, est-ce que vous n’en mangerez plus de votre vie ?

ANGÉLIQUE

Vous avez beau me parler d’un ton badin ; mais j’ai le cœur trop serré, trop navré.

MARTHE

Cela passera… Me sauriez-vous dire, mademoiselle, quelle heure il est ?

ANGÉLIQUE

Pourquoi me demandez-vous cela ? Est-ce que vous voulez vous en aller si tôt ?

MARTHE

J’ai mes raisons pour vous le demander. N’avez-vous pas une montre ?