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Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/187

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du monde, et le prie de l’honorer de quelques visites, pour la remettre peu à peu dans le bon chemin ; elle lui indique l’une ou l’autre de ses demeures ; le médecin spirituel ne manque pas de s’y rendre, dans l’intention vraie ou apparente de ramener une brebis égarée au bercail du Seigneur. Mais il arrive qu’au lieu de fermer la plaie, ce bon médecin la rouvre ; et elle en rit de tout son cœur en voyant que les gens d’église sont si aisément attaqués de la même maladie dont ils prétendent guérir les autres.

Quelquefois elle déguise son sexe, et habillée en voyageur, elle entre, sur le soir, dans un couvent de religieux qui n’ont point de barbe au menton, et qui, par une oisiveté bien nourrie, sont des athlètes robustes et puissants en tous combats. Elle se jette aux pieds du père prieur, fait un roman, et met en jeu diverses aventures d’amour ou de guerre ; elle dit que dégoûtée du monde et de ses maximes, elle sent l’excès de ses fautes et veut les expier ; qu’elle veut, en un mot, se fixer pour le reste de ses jours dans un asile monastique pour être dans la voie du salut. Ses accents sont entrecoupés de soupirs, de larmes, de sanglots, il semble qu’elle en étouffe ; pour se soulager, ses deux mains ouvrent sa veste, et le père observateur entrevoit les marques non équivoques et les plus séduisantes de son sexe : il en est d’abord scandalisé, puis tout ému, puis attendri, puis tout enflammé… Il veut