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Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/29

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ANGÉLIQUE

C’est un livre de prières, je crois.

MARTHE

Il en a au moins toute l’apparence ; mais c’est un recueil de maximes morales qu’un abbé, mon confesseur, me donna dans ma jeunesse ; et je vous assure qu’en le lisant, les préjugés dont on avait nourri mon enfance, disparurent bientôt.

ANGÉLIQUE

Mais pourra-t-il me persuader que ce n’est pas un crime de se prostituer ?

MARTHE

Se prostituer ? Quel terme barbare ! Lisez seulement, et vous aurez le pouvoir de mépriser l’injustice de l’opinion.

ANGÉLIQUE

Je veux vous croire ; mais il me reste une difficulté. Vous avez, sans doute, goûté les plaisirs ; mais avez-vous été heureuse ? Vous me dites que ce chemin est celui des richesses et du bonheur, et vous voilà aussi pauvre que moi.

MARTHE

Ah ! mademoiselle, c’est ma faute ; c’est précisément de mon état que vous devez tirer l’argument le plus fort, le plus puissant, pour vous convaincre de la vérité de mon discours. Mes jours s’écoulaient dans les plaisirs et dans