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Page:La Rhétorique des putains, 1880.djvu/99

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ANGÉLIQUE

Je vous passe cette flatterie.

MARTHE

Mais consultez votre miroir, il vous dira que je ne suis pas une flatteuse.

ANGÉLIQUE

Mon miroir, ou mon amour-propre pourrait bien me tromper.

MARTHE

À vous dire vrai, hier en sortant de chez vous, je vis votre tailleuse et la marchande de modes avec qui elle entrait ; l’envie me prit de remonter après elles pour avoir le doux plaisir d’assister à cet agréable changement de décoration ; j’eus cependant la force de résister à ce désir impérieux, mais imprudent, dans l’espérance qu’aujourd’hui il serait accompli. J’allai donner quelques autres leçons, et en me rendant chez moi, sur le soir, je passai par ici ; je vous vis à la fenêtre ; il me sembla voir toute votre âme dans vos yeux ; vos yeux suivaient un jeune officier qui allait, qui venait, dont les regards enflammés annonçaient une passion naissante dans son cœur ; il disparut, mais, quelques moments après, je vis son domestique entrer chez vous : tout cela produisit la plus grande satisfaction à ma curiosité… Mais, pardon, mademoiselle, cette curiosité vous offense peut-être, et je vous prie…