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ET MAXIMES MORALES
dire que cette constance et ce mépris sont à leur esprit ce que le bandeau est à leurs yeux[1]. (éd. 1*.)
XXII
La philosophie triomphe aisément des maux passés et des maux à venir[2], mais les maux présents triomphent d’elle[3]. (éd. 1*.)
XXIII
Peu de gens connoissent la mort : on ne la souffre pas ordinairement par résolution, mais par stupidité et par coutume[4], et la plupart des hommes meurent parce qu’on ne peut s’empêcher de mourir[5]. (éd. 1*.)
- ↑ Var. : Ceux qu’on fait mourir affectent quelquefois des constances, des froideurs, et des mépris de la mort, pour ne pas penser à elle (le manuscrit ajoute : et pour s’étourdir : de sorte qu’on peut dire que ces froideurs et ces mépris font à leur esprit ce que le bandeau (manuscrit : le mouchoir) fait à leurs yeux. (Manuscrit et 1665.) — Voyez les maximes 23, 46 et 504. — Dans la maxime 420, l’auteur dira à peu près la même chose de la constance dans les malheurs.
- ↑ Var. : des maux passés et de ceux qu’un ne sont pas prêts d’arriver. (1665.)
- ↑ Var. : La philosophie ne fait des merveilles que contre les maux passés ou contre ceux qui ne sont pas prêts d’arriver, mais elle n’a pas grande vertu contre les maux présents. (Manuscrit.)
- ↑ Var. : on la souffre, non par la résolution, mais par la stupidité et par la coutume. (Manuscrit.) — Montaigne (Essais, livre III, chapitre ix, tome III, p. 477 et 478) : « le me plonge, la teste baissée, stupidement dans la mort, sans la considérer et recognoistre. »
- ↑ Var. : et la plupart des hommes meurent parce qu’on meurt. (Manuscrit et 1665.) — L’annotateur contemporain qualifie de galimatias la première phrase de cette maxime, et objecte : « Comment connoître une chose que l’on ne peut voir que dans les autres ? » — Vauvenargues (maxime 848, Œuvres, p. 484) : « La gloire et la stupidité
est plus dur de l’appréhender (la mort) que de la souffrir. » — Pascal dit de son côté (Pensées, article VI, 58) : « La mort est plus aisée à supporter sans y penser, que la pensée de la mort sans péril. »